JESSICA DOS SANTOS / RICARDO VAZ

 INVESTG’ÁCTION

Editorial : Nouveau cycle progressiste?

 L’expérience Macri aux commandes du destin de l’Argentine s’est brusquement terminée dimanche avec une défaite majeure aux élections présidentielles.

Le magnat argentin a à peine obtenu 40,37% des voix, contre 48,10% du duo gagnant Alberto Fernández – Cristina Fernández.

Macri a remporté les élections en 2015 avec un message («populiste!») de «changement», promettant d’arranger la situation économique et de contrôler l’inflation. Le manque de charisme de son adversaire (Daniel Scioli) a également beaucoup joué en sa faveur.

La suite a effectivement été un « changement », mais pas exactement à l’image de ce qui avait été promis aux électeurs. Avec un agenda ouvertement en faveur des grandes entreprises, dont Macri fait partie, le gouvernement n’a même pas réussi à tenir ses principales promesses à savoir contrôler le taux de change et maîtriser l’inflation.

Les problèmes n’ont fait qu’empirer et Macri a eu recours à une « solution » qui a réveillé des fantômes pas si lointains en Argentine: le Fonds monétaire international. L’organisme multilatéral a accordé le prêt le plus important de son histoire, 56 milliards de dollars, associé à un programme d’austérité brutal qui a très rapidement affecté la qualité de vie des Argentins, principalement ceux issus des classes populaires.

Les services publics tels que l’électricité et le gaz ont été soumis à des hausses de prix, avec des augmentations dépassant les 1 000% dans certains cas, ce qui entraîné la faillite des entreprises et a laissé des familles entières dans l’incapacité de paiement. Les licenciements collectifs dans le secteur public et les énormes coupes budgétaires au niveau des prestations sociales, de l’éducation et de la santé font également partie du revers de la médaille.

Cependant, les mesures n’ont pas permis de définir les objectifs visés (comme c’est souvent le cas avec ce genre de mesures) à savoir la maîtrise de l’inflation et la réduction du déficit à zéro. Au même moment, différents secteurs de la société se sont mobilisés pour rejeter ces mesures antipopulaires, un mécontentement indéniable qui s’est clairement exprimé dans le vote.

C’est de ce pays fortement appauvri avec une économie endettée et en récession qu’ Alberto et Cristina Fernández sont maintenant en charge. Le gouvernement de Cristina Fernández, à l’image d’autres de sensibilité «progressiste» dans la région, avait réagi de manière conservatrice à la crise mondiale du capitalisme, ce qui avait précipité l’épuisement du projet à cette époque. Ce duo aura-t-il l’audace nécessaire pour résoudre la crise en faveur de la grande majorité?

Le duo Fernández-Fernández assumera le 10 décembre la charge d’une économie en récession, du troisième taux d’inflation le plus élevé au monde, d’une monnaie qui perd de sa valeur au jour le jour et d’une restructuration de la dette en suspens.

Pour ce faire, Alberto Fernández peut compter sur l’un de ses collaborateurs, Guillermo Nielsen, ancien secrétaire aux finances qui a mené la restructuration de la dette en 2005, lorsque le pays a convenu avec 76% des grands créanciers obligataires de restructurer quelques 100 000 millions de dollars de dettes en défaut de paiement depuis 2001.

En outre, le nouveau gouvernement devrait focaliser sur le ralentissement du taux d’inflation et l’amélioration des comptes budgétaires, sans toutefois négliger les graves problèmes sociaux de l’Argentine, où la pauvreté, qui a dépassé 35% de la population, est associée à des niveaux de pauvreté des enfants encore plus préoccupants.

Tout cela dans un pays profondément divisé, car s’il est vrai que le péronisme est soutenu par la foule, le gouvernement Kirchner a également provoqué le rejet de nombreux secteurs et l’opposition dépasse de nos jours les dix millions de voix. Les accords économiques doivent également être sociaux, principalement pour marquer les différences avec le projet macriste, qui a toujours mis le poids de la crise sur les épaules des secteurs populaires.

Précisément, la défaite de Macri, à une époque où les projets néolibéraux sont fortement remis en cause sur tout le continent, met définitivement de côté la théorie de la fin du cycle progressif dans la région.

Bien que le cycle progressif mérite une analyse critique pour ne pas retomber dans les mêmes erreurs, l’épuisement rapide du projet macriste en Argentine démontre le rejet généré par les politiques néolibérales (et le FMI en particulier) chez les peuples d’Amérique latine.

La victoire de Fernández-Fernández et le paysage politique incertain de nations telles que le Chili, l’Équateur et le Brésil constitue une opportunité pour l’intégration de l’Amérique latine, promue il y a quelques années par le dirigeant vénézuélien Hugo Chávez Frías. Ce scénario provoque la peur chez les élites du continent et un immense espoir parmi les peuples.

 

 

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